Dans cet ouvrage datant de 2006, le géographe Jacques Lévy propose de substituer à la notion de « vitesse » celle d’IMAC pour fonder une nouvelle métrique urbaine moins asservie à l’impérialisme de la voiture.
Pour Jacques Lévy, l’IMAC – « Interactions Multisensorielles Aléatoires de Contacts » renvoie simplement à la reliance, dont on connait l'importance dans l'imaginaire des transports collectifs. Une grille d’évaluation basée sur ce nouvel indicateur permet d’évaluer pertinence des différents modes urbains.
A partir de ce principe d’évaluation, Jacques Lévy évoque débouche sur trois conclusions :
- Le faible score de l'automobile est lié au caractère parasitaire du système automobile « sur l'espace urbain préexistant.
- La marche à pied, en compensant sa lenteur par un très faible coût, une très bonne fiabilité et sécurité, trois composantes essentielles dans le choix d'un mode de transport, remporte le meilleur score.
- « Les autres métriques obtiennent des résultats assez voisins, ce qui laisse penser que chacun possède un ensemble spécifique d'avantages et d'inconvénients et conduirait, si on prenait ce tableau comme base pour une politique publique, à imaginer entre eux une complémentarité plutôt qu'un choix exclusif en faveur de l'un ou de l'autre ».
Au travers de ces indicateurs, Jacques Lévy invite à reconsidérer les socles de nos modèles urbains longtemps dominé par "la loi du mode le plus rapide" comme valeur motrice de l'organisation des villes. Au passage, il tacle ceux qui tentent, tels Marc Wiel, d'imposer à la ville une lenteur salvatrice. "Le problème n'est donc pas tant de diminuer la vitesse automobile pour dissuader les automobilistes... Il s'agirait au contraire d'augmenter la part de ville compacte, ce qui aurait certes pour conséquence indirecte de rendre la circulation automobile moins facile, mais aurait surtout pour visée d'augmenter la vitesse globale de la ville".
- Ville pédestre, ville rapide, Jacques Lévy,
- Le renouveau de la marche à pied, Soni Lavidinho, Thèse de doctorat en Géographie, sept. 2011,
- Des villes qui marchent, Etat de l'art "tendances durables en santé, mobilité et urbanisme" (ANR, ENS LSH Lyon, EPFL Lausanne).
Définition des IMAC par Jacques Lévy
Les interactions multisensorielles aléatoires au contact (IMAC), les rencontres non programmées avec des réalités effectués par la médiation de l’ensemble de l’appareil sensoriel.
Les IMAC ne sont pas le seul type d’interaction possible dans la ville mais elles en sont le plus spécifique, le seul qui ne soit possible, en quantité et en qualité significatives, que dans un espace urbain. Leur force est qu’elle échappe au caractère «thématisé» des rencontres, professionnelles ou amicales, pré-organisées ou des lieux spécialisés (bibliothèques).
Tout en fabriquant des liens faibles et, le plus souvent, éphémères, elles se trouvent au cœur de la confrontation de l’acteur avec les altérités. Elles offrent des conditions plus favorables que dans d’autres configurations (notamment celles du Web, très ouvertes mais peu interactives) pour bénéficier de la serendipity (trouver ce qu’on ne cherche pas) et des déplacements d’une réalité d’un registre, d’un ordre, d’un univers à un autre, ce qui constitue la force productive principale des activités créatives.
Là se trouve l’un des avantages comparatifs majeurs des zones urbaines denses et diverses, qui explique pourquoi les activités à forte composante d’innovation, et en particulier lorsque ces innovations se nourrissent d’une multitude de ressources mal définies au départ, s’y localisent de manière massive.
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